Le présent numéro des EDCJFA était consacré à la publication d’une étude comparative des messieurs R. Grosshans et M. Wernet sur « le droit de travail – son développement et sa portée actuelle en France et en Allemagne-« 

Cette oeuvre est ici proposée au format PDF texte.

Préface

Après les études comparatives des mesdames FRIED/QUECKENSTEDT/HOSER/KUDER/WOLF en 1995 et le travail franco-allemand de madame LANGE sur l’enseignement privé en 1997, les responsables de cette série ont retenu cette lois pour publication un travail rédigé par deux étudiants du département juridique de l’Université de la Sarre à l’occasion d’un séjour d’études dans une faculté française (Nantes) grâce à une bourse d’Office franco-allemand de la jeunesse.
Nous voulons ainsi apporter un nouveau témoigne de la fécondité de la démarche spécifique des juristes sarrois, qui consiste à aborder l’étude du droit du pays partenaire dès un stade précoce de la Formation juridique nationale.

Christian Autexier, Claude Witz

 

Introduction:
De nos jours, le problème le plus important et le plus immédiat sur lequel les hommes politiques doivent se pencher s’avère être le chômage. Aujourd’hui, le taux de chômage est très élevé en Europe; dés l’apparition de ce phénomène, il suscita de nombreuses discussions sur les solutions envisageables, dont la proposition d’un droit au travail.
Pour mémoire, on peut indiquer principalement trois doctrines basées sur le droit au travail, à savoir la doctrine du droit naturel, la doctrine sociale chrétienne et le socialisme.

Selon la théorie du droit naturel, chaque être humain a le droit d’assurer son existence par le travail selon ses forces et capacités. Seul le travail permet à l’homme de garder sa dignité naturelle et sa liberté. Le travail est donc à l’origine et fondement de tout droit. C’est pourquoi chacun possède un droit au travail comme besoin personnel.

L’argumentation de la doctrine sociale chrétienne est identique, estimant que Dieu a créé l’homme, doté d’un besoin de travailler. Par son travail, celui-ci peut donc participer à l’œuvre créatrice de Dieu. C’est la raison pour laquelle, il faut essayer de donner à l’homme la possibilité de se réaliser pleinement avec les capacités que Dieu lui a conférées. Cette conception plutôt individualiste est complétée par la mise en valeur de l’obligation faite à chacun de travailler du fait d’une solidarité chrétienne et, à l’inverse, pour la société de l’obligation de donner du travail à ceux qui le cherchent.
Enfin, pour les doctrines socialistes, l’homme se distingue de l’animal par son travail ainsi que de la nature comme force autonome. Par son activité, l’homme doit se réaliser et développer sa personnalité. Le travail – impliquant aussi une activité sociale – ne remplit sa fonction que si l’on est «libre». Mais tant que les moyens de production sont issus de la propriété privée, l’homme ne peut agir librement. Par conséquent, seule la nationalisation rend le travail libre et permet une réalisation d’un droit au travail.

Or, une appréciation du droit au travail ne peut se faire qu’à partir d’une approche systématique. Il convient ainsi d’examiner le but, le destinataire et la mise en œuvre de son énoncé. Trois éléments qui – depuis la Révolution française- sont restés inchangés :

-quant à l’objectif du droit au travail, ses défenseurs estiment jusqu’à aujourd’hui qu’il s’agit de surmonter le chômage ou de le supprimer de manière humaine,
-dont les États nationaux en tant que destinataires assument en premier la responsabilité,
-une réalisation de cet objectif serait possible -selon eux- par l’intermédiaire du droit constitutionnel.

En effet cette caractérisation permet une différenciation du droit au travail avec d’autres droits:

-Le droit de travailler
Garantissant le libre choix du métier et de son exercice, ce droit constitue un droit libéral classique doté d’une structure négative, protégeant l’individu contre des empiétements étatiques. Le droit au travail vise, en revanche, une action positive de l’État pour fournir un emploi au citoyen. Néanmoins, comme an le verra dans la première partie, chapitre premier, il y eut une tentative d’interprétation du droit de travailler comme une première reconnaissance du droit au travail.

-Le droit à l’occupation
suppose un contrat de travail déjà conclu et attribue à tout employé le droit de toucher non seulement le salaire prévu dans le contrat mais aussi d’être effectivement occupé. II s’agit d’un droit relatif à mettre en œuvre par l’employeur alors que le droit au travail, puisqu’il concerne le stade antérieur à la conclusion d’un contrat de travail, constitue une créance absolue contre l’État.

-Le droit au poste de travail
Découlant de la volonté de protéger plus particulièrement les contrats individuels de travail, le droit au poste de travail contient le droit appartenant à l’employé d’être et de rester -aussi longtemps qu’il le souhaite- membre de l’entreprise. Comme le droit à l’occupation, il est fondé sur des liens de travail déjà préexistants et s’adresse à l’employeur, se distinguant ainsi nettement du droit au travail.

En effet, le droit au travail a toujours soulevé de nombreuses discussions sur le plan juridique, tant en France qu’en Allemagne. II ne s’agit donc pas d’une question apparue récemment, mais soulevée depuis le XVIII siècle.
Ainsi, il convient d’examiner de manière précise les différentes évolutions historiques entre ces deux pays. C’est pourquoi nous aborderont dans une première partie, l’évolution en France de l’idée du droit au travail et son actualité, puis nous étudierons, dans une seconde partie, les développements en Allemagne de cette notion.