Cour constitutionnelle d’Allemagne, 22 mai 2019, n° 1 BvQ 42/19

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Source / Fundstelle:IN: Revue internationale de droit comparé, 2019, n° 4, p. 1180-1181
Revue / Zeitschrift:Revue internationale de droit comparé
Année / Jahr:2019
Catégorie / Kategorie:Droit constitutionnel
Mots clef / Schlagworte:Parti politique, PROCEDURE DE REFERE, réseau social
Le parti politique "Der III. Weg" (la troisième voie), qui a candidaté lors des récentes élections européennes, a publié le 21 janvier 2019 sur son profil Facebook un lien dirigeant vers un article que la société Facebook a classé en tant que discours haineux ( contenu xénophobe et anti-migrant). Dès la parution du lien, la société Facebook a rendu cette publication inaccessible sur la page du parti. Suite aux protestations de ce parti à l'égard de cette mesure, la société Facebook a supprimé son compte utilisateur. La Cour constitutionnelle allemande (Bundesverfassungsgericht)  a estimé, dans le cadre d'un référé, que la société Facebook devait rétablir l'accès à la page de la requérante jusqu'à la publication des résultats officiels des élections européennes par la République fédérale d'Allemagne. La Cour a précisé que le droit et l'obligation de Facebook de surveiller le contenu potentiellement illégal étaient maintenus. La Cour a statué en matière de référé sans se prononcer sur le fond de l'affaire. La Cour a fait droit à la demande de la requérante, considérant qu'elle ignorait la façon dont le juge du fond allait statuer (à ce stade, il n'est pas certain que la requête soit irrecevable ou infondée) et estimant que l'évaluation de l'impact de la mesure prise par Facebook s'analyse en faveur de la requérante. La Cour rappelle tout d'abord que les entreprises, et plus généralement les organismes privés, lorsqu'ils exécutent des missions de service public ou mettent en place un " espace public de communication ou de vie sociale", sont tenus de respecter les droits fondamentaux. Néanmoins, selon la Cour, les rapports juridiques liant les responsables des réseaux sociaux et leurs utilisateurs n'ont pas encore été qualifiés sous l'angle du droit constitutionnel. En outre, à ce stade, il n'est pas possible d'évaluer avec un niveau de précision suffisant, et en respectant les droits fondamentaux, si la publication litigieuse contient des éléments relevant du droit pénal. La Cour en conclut que la demande de la requérante soulève des questions juridiques complexes qui ne peuvent être tranchées dans le cadre d'une procédure de référé. D'après les indications apportées par la société Facebook, son réseau social est utilisé par plus de 30 millions d'utilisateurs par mois en Allemagne. Selon la Cour, en interdisant l'accès aux offres de la société Facebook, la requérante est privée de la possibilité de distribuer ses messages politiques par l'intermédiaire de ce réseau social et de rentrer directement en contact avec ses utilisateurs. La Cour considère donc que, dans l'hypothèse où la société Facebook ne serait pas condamnée à rétablir, en faveur de la requérante, l'accès à sa page, celle-ci serait privée de la possibilité d'utiliser ce réseau social en tant que moyen de comnmunication. Cela pourrait avoir une influence considérable sur la visibilité de la requérante sur internet, surtout en période de campagne électorale, en prévision des élections européennes. Enfin, la Cour souligne l'urgence de la demande dans l'attente de la publication des résultats officiels des élections européennes.